Kurogane Tsuki

Kurogane est quelqu'un de très associable, il ne cherche pas à s'attacher aux autres. Ses yeux sont vides, on dirait un corps sans âme qui s'avance dans le monde des vivants par pur mécanisme prédéterminé. Il n'agit que par logique et ne réfléchit qu'ainsi. Il ne voit le monde qu'à travers un regard froid. Ce n'est pas quelqu'un de méchant mais il ne se montre pas naturellement gentil envers les autres. Il est indifférent. C'est ça qui le caractérise.
On ne sait pas non plus à quoi il pense, son visage est inexpressif. Parfois quand il a cette étincelle de mélancolie, comme s'il avait perdu quelque chose. La peur, l'envie, la colère... Les a-t-il déjà expérimenté ? Que lui reste-t-il à découvrir ?

Je suis né au Japon mais je n'y ai jamais vécu. Ma mère était américaine, elle m'a ramené dans son pays natal. Mon père ne l'a jamais su, et je ne l'ai jamais connu. On peut dire que ça a été une hantise pour moi de ne pas avoir de repère paternel. Pourtant j'ai toujours décidé de rester simple et ma vie est le déroulement de cette pensée. J'allais en cours sans me poser de questions, écoutais ce que les professeurs avaient à m'apprendre, mémorisais, appliquais... Encore et encore, sans relâche. Rapidement, ma mère a cessé de me regarder, elle ne voyait en moi que le fruit d'un voyage qu'elle aurait aimé oublier. Ses yeux étaient devenus vides tout comme les miens et rien n'arrivait à hattiser sa flamme. C'était donc logique qu'elle mette fin à ses jours. En rentrant à l'appartement je découvris son corps pendu au lustre du salon. Il était tellement léger qu'il ne le faisait pas tombé. On aurait dit qu'elle était accrochée depuis des jours. J'avais toujours ces mêmes yeux d'indifférences, cette voix incroyablement lassée quand j'appelai la police, ne sachant pas vers qui me tourner. Rapidement les services sociaux m'emmenèrent. Je fus récupéré par un oncle dont je n'avais jamais entendu parlé, un chic type qui avait déjà une fille, ma cousine. Elle s'appelait Anaëlle. Quelques jours après mon arrivée, elle disparut sans laisser de traces. Pendant un temps on me suspecta de lui avoir fait du mal, je trouvais ça logique et je laissai la police m'interroger, répondant à chacune de leurs questions indiscrètes qui me laissèrent de marbre.
Quand tout cela fut finit, mon oncle me prit sous son aile comme si je permettais de combler le manque que sa fille avait laissé derrière elle. Il ne ramenait pas beaucoup de monde à la maison, mais quand il le faisait il me demandait de rester dans ma chambre de sorte à ce que je ne vois pas la tête de ses invités. Cependant les pas lourds dans le couloir m'indiquaient souvent qu'il s'agissait d'hommes. Il n'osait pas me regarder quand je sortais de ma chambre ces matins-là et je faisais semblant de ne pas le remarquer. A vrai dire, je m'en fichais. Je n'étais pas intéressé par ce genre de choses, ni par l'amour, ni par le sexe, la célébrité, l'argent, toute notion qui pouvait au final rendre un homme un peu plus heureux.
Puis un jour, il disparut comme les autres.
Deux ans plus tard, après être passé de familles d'adoptions en familles d'adoptions, je décidai de retrouver mon père. Et sur le chemin de l'aéroport, après avoir trouvé de quoi financer illégalement mon projet, je disparus à mon tour.